Nature - environnement
Pour le gouvernement, le ministère de l’écologie, comme pour certaines associations qui se prétendent écologistes, la réponse à cette question est positive mais, en général elle est implicite, pour ne pas dire volontairement passée sous silence. On comprend d'ailleurs très bien pourquoi !
En effet comme il est démontré dans le rapport publié par les associations Canopée, Fern et Les Amis de la Terre France, « En proposant une hausse des prélèvements jusque 95 % d’ici 2050, les stratégies nationales actuelles (SNBC, PNFB, Afterre) ne détaillent pas l’effet de ce choix sur les stress subis par les arbres, les stocks de biomasse dans l’écosystème, la fertilité du sol sous l’effet du prélèvement des branches, la biodiversité sous l’effet du prélèvement des bois morts et de la raréfaction des gros et très gros bois, les conflits d’usage. Une telle optique peut mener à une déstabilisation des écosystèmes imposant progressivement la pratique des cycles courts et le renouvellement par plantation. » [Gestion forestière et changement climatique : une nouvelle approche de la stratégie nationale d’atténuation, p.6]. De plus, il supposerait « des mesures autoritaires de mobilisation des surfaces et des volumes sur pied » On sacrifie donc les forêts, leur biodiversité et leur naturalité pour « sauver » le climat. Sauver le climat ou faire du business et des profits ?
Derrière l’objectif affiché de ce sauvetage, il y en a bien souvent un autre plus terre à terre et dans les incitations à exploiter les forêts, il est au moins autant question d’économie, de rapport, de développement des territoires, de valorisation, que de climat. D’autant qu’il y a une autre stratégie possible qui non seulement permettrait de préserver la forêt mais qui lui permettrait de mieux jouer son rôle dans l’atténuation du réchauffement climatique comme l’établit le rapport cité à partir des connaissances scientifiques actuelles et en recourant à des données confirmées concernant l’état actuel et prévisible de la forêt française.
Lien permettant de charger le rapport publié par les associations « Canopée », « Fern » et « les Amis de la Terre France » https://www.canopee-asso.org/wp-content/uploads/2020/02/Rapport-WEBfor%C3%AAt-climat-Fern-Canop%C3%A9e-AT_Optimizer.pdf
Pour un résumé https://www.canopee-asso.org/wp-content/uploads/2020/03/LAISSER_VIEILLIR_LES_ARBRES_BD_3.pdf ]
Derrière l’objectif affiché de ce sauvetage, il y en a bien souvent un autre plus terre à terre et dans les incitations à exploiter les forêts, il est au moins autant question d’économie, de rapport, de développement des territoires, de valorisation, que de climat. D’autant qu’il y a une autre stratégie possible qui non seulement permettrait de préserver la forêt mais qui lui permettrait de mieux jouer son rôle dans l’atténuation du réchauffement climatique comme l’établit le rapport cité à partir des connaissances scientifiques actuelles et en recourant à des données confirmées concernant l’état actuel et prévisible de la forêt française.
Lien permettant de charger le rapport publié par les associations « Canopée », « Fern » et « les Amis de la Terre France » https://www.canopee-asso.org/wp-content/uploads/2020/02/Rapport-WEBfor%C3%AAt-climat-Fern-Canop%C3%A9e-AT_Optimizer.pdf
Pour un résumé https://www.canopee-asso.org/wp-content/uploads/2020/03/LAISSER_VIEILLIR_LES_ARBRES_BD_3.pdf ]
Le rapport propose une autre stratégie qui permet de préserver les forêts et il l’estime plus efficace pour le climat et la biodiversité. Cette stratégie s’articule autour de cinq points forts :
1 – Laisser 25% de la forêt française en libre-évolution
2 – Miser sur la résilience et la diversité des espèces
3 – Allonger l’âge de récolte des arbres
4 – Répartir les coupes sur l’ensemble des massifs
5 – Pratiquer une sylviculture maintenant le couvert forestier, donc pas de coupes rases.
Ces préconisations sont un moindre mal. Elles ne font que remettre en avant des principes de gestion des forêts qui ont été trop souvent oubliés car incompatibles avec une foresterie productiviste à base de coupes rases, d’utilisation de produits phytosanitaires et des machines de plus en plus lourdes qui tassent le sol forestier. Ce qui conduit à la réduction des forêts de production à de plantations d’arbres, en général des résineux à croissance rapide dont les douglas sont l’archétype.
*********
Cependant, en voulant adopter une position médiane entre une sylviculture intensive qui nuirait à la naturalité et à la biodiversité des forêts et une foresterie extensive sous prétexte d’éviter une pénurie éventuelle de bois d' œuvre « accentuant les fermetures de scieries, les problèmes d’emploi en zone rurale et entraînant la hausse des imports » le rapport propose « le maintien jusque 2050 d’un prélèvement de 60 Mm3/an avec augmentation des surfaces gérées pour mieux répartir ce prélèvement dans l’espace » [souligné par moi]. C’est le point 4 de cette stratégie et c’est ce point qui est problématique.
En France la propriété forestière est très morcelée (certains considèrent que c’est à cause de la suppression du droit d’aînesse!), beaucoup de forêts sont constituées de petites parcelles privées qui ne sont pas exploitées et laissées à l’abandon parce que non rentables à cause notamment de leur exiguïté où de la difficulté d’accès. C’est le cas dans le Puy de Dôme par exemple. Ces forêts non « gérées » sont des territoires à forte naturalité précisément parce qu’elles ne sont pas gérées, entendez non exploitées.
Or le Conseil départemental du Puy de Dôme veut les mettre « en valeur » ! Il développe pour cela des « Plans de Développement de Massif forestier (PDM) » dont l’objectif est « la mise en gestion pérenne de la forêt privée et donc une augmentation du niveau de mobilisation des bois. » ( gestion pérenne = coupes et augmentation des coupes ! Il faut oser !) [Ludovic Gerardi, « La filière forêt-bois » Direction de l'Aménagement des Territoires, sur le site du Conseil Départemental du Puy de Dôme] L’auteur de ce texte insiste « L'objectif est d'inciter les propriétaires à gérer leur patrimoine et par conséquent de faire des coupes de bois, de mobiliser les opérateurs économiques et de montrer aux élus les potentialités de développement de leur territoire en provenance de la forêt. » [Souligné par moi]. Cela s’accompagne d’aide à la réalisation des travaux de desserte forestière pour pallier les difficultés d’accès et d’aides au « regroupement du foncier forestier » pour avoir des parcelles suffisamment étendues pour une exploitation rentable. Au moins, c’est clair ! Adieu la naturalité et la spontanéité qui va de pair !
Le cas du Puy-de-Dôme n’est pas un cas isolé : on retrouve sous une forme ou sous une autre, le même type de politique dans tous les départements forestiers. Il s’agit ni plus ni moins de donner les moyens administratifs, matériels et financiers d’exploiter des forêts laissées en libre évolution. Face à cela, le garde-fou des 25 % proposé par ce rapport peut sembler dérisoire.
Bien que ce ne soit pas son objectif, ce rapport en fin de compte propose une foresterie conforme aux critères de la taxonomie verte de Bruxelles, ce que n’est pas une foresterie qui se conformerait aux objectifs du gouvernement français pour la filière bois dans le cadre de la « transition énergétique ». En effet, non seulement ils ne contribueraient pas à l’atténuation du changement climatique (au moins pour la filière bois-énergie), mais de plus même si c’était le cas, ce serait au dépend de la protection d’écosystèmes sains et aussi de la protection de l’eau.
Pour rappel ces critères sont les suivants :
1. Atténuation du changement climatique
2. Adaptation au changement climatique
3. Utilisation durable et protection de l’eau et des ressources marines
4. Transition vers une économie circulaire, prévention et recyclage des déchets
5. Prévention et réduction de la pollution
6. Protection des écosystèmes sains
De plus pour être considérée comme verte une activité doit satisfaire à au moins un de ces critères sans contrevenir à aucun des autres.
*********
Les auteurs démontrent que la poursuite de l’objectif d’atténuation du réchauffement climatique implique une foresterie qui respecte les équilibres écologiques des systèmes forestiers et en préserve la biodiversité. Mais qu’en serait-il si cela était l’inverse et que soit plus performante pour atténuer le réchauffement climatique une sylviculture productiviste maximisant les volumes récoltés, des cycles courts avec coupes rases pour décarboner l’énergie ? Devrait-on sacrifier la biodiversité et la naturalité des forêts sur l’autel de la «lutte contre le changement climatique » ?
Comme les Amis de la Terre sont impliqués par ce rapport, je présume, peut-être à tort, que la réponse serait positive. Quoi qu’il en soit, il est évident que dans la stratégie développée dans ce rapport comme dans les stratégies concurrentes qui font bon marché de la naturalité et de la biodiversité, la préoccupation principale n’est pas une bonne préservation des écosystèmes forestiers et la préservation de leur naturalité. Celle-ci est subordonnée à un objectif d’atténuation du réchauffement climatique qui est premier, prioritaire. Il n’est nullement remis en cause dans ce rapport et c’est ce qui en fait les limites.
Il présente une stratégie gagnant/gagnant pour l’atténuation du RC et la préservation des écosystèmes forestiers. On peut aussi considérer qu’il s’agit en proposant une telle stratégie de sauver la forêt que les stratégies gouvernementales d’atténuation du RC et de décarbonation de l’énergie risquent de mettre à mal. Hélas, ce sont ces dernières qui ont bien plus de chance d’être appliquées.
Misère de ces temps de panique, où toute politique de protection de la nature et des paysages doit passer sous les fourches caudines du sauvetage du climat !
1 – Laisser 25% de la forêt française en libre-évolution
2 – Miser sur la résilience et la diversité des espèces
3 – Allonger l’âge de récolte des arbres
4 – Répartir les coupes sur l’ensemble des massifs
5 – Pratiquer une sylviculture maintenant le couvert forestier, donc pas de coupes rases.
Ces préconisations sont un moindre mal. Elles ne font que remettre en avant des principes de gestion des forêts qui ont été trop souvent oubliés car incompatibles avec une foresterie productiviste à base de coupes rases, d’utilisation de produits phytosanitaires et des machines de plus en plus lourdes qui tassent le sol forestier. Ce qui conduit à la réduction des forêts de production à de plantations d’arbres, en général des résineux à croissance rapide dont les douglas sont l’archétype.
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Cependant, en voulant adopter une position médiane entre une sylviculture intensive qui nuirait à la naturalité et à la biodiversité des forêts et une foresterie extensive sous prétexte d’éviter une pénurie éventuelle de bois d' œuvre « accentuant les fermetures de scieries, les problèmes d’emploi en zone rurale et entraînant la hausse des imports » le rapport propose « le maintien jusque 2050 d’un prélèvement de 60 Mm3/an avec augmentation des surfaces gérées pour mieux répartir ce prélèvement dans l’espace » [souligné par moi]. C’est le point 4 de cette stratégie et c’est ce point qui est problématique.
En France la propriété forestière est très morcelée (certains considèrent que c’est à cause de la suppression du droit d’aînesse!), beaucoup de forêts sont constituées de petites parcelles privées qui ne sont pas exploitées et laissées à l’abandon parce que non rentables à cause notamment de leur exiguïté où de la difficulté d’accès. C’est le cas dans le Puy de Dôme par exemple. Ces forêts non « gérées » sont des territoires à forte naturalité précisément parce qu’elles ne sont pas gérées, entendez non exploitées.
Or le Conseil départemental du Puy de Dôme veut les mettre « en valeur » ! Il développe pour cela des « Plans de Développement de Massif forestier (PDM) » dont l’objectif est « la mise en gestion pérenne de la forêt privée et donc une augmentation du niveau de mobilisation des bois. » ( gestion pérenne = coupes et augmentation des coupes ! Il faut oser !) [Ludovic Gerardi, « La filière forêt-bois » Direction de l'Aménagement des Territoires, sur le site du Conseil Départemental du Puy de Dôme] L’auteur de ce texte insiste « L'objectif est d'inciter les propriétaires à gérer leur patrimoine et par conséquent de faire des coupes de bois, de mobiliser les opérateurs économiques et de montrer aux élus les potentialités de développement de leur territoire en provenance de la forêt. » [Souligné par moi]. Cela s’accompagne d’aide à la réalisation des travaux de desserte forestière pour pallier les difficultés d’accès et d’aides au « regroupement du foncier forestier » pour avoir des parcelles suffisamment étendues pour une exploitation rentable. Au moins, c’est clair ! Adieu la naturalité et la spontanéité qui va de pair !
Le cas du Puy-de-Dôme n’est pas un cas isolé : on retrouve sous une forme ou sous une autre, le même type de politique dans tous les départements forestiers. Il s’agit ni plus ni moins de donner les moyens administratifs, matériels et financiers d’exploiter des forêts laissées en libre évolution. Face à cela, le garde-fou des 25 % proposé par ce rapport peut sembler dérisoire.
Bien que ce ne soit pas son objectif, ce rapport en fin de compte propose une foresterie conforme aux critères de la taxonomie verte de Bruxelles, ce que n’est pas une foresterie qui se conformerait aux objectifs du gouvernement français pour la filière bois dans le cadre de la « transition énergétique ». En effet, non seulement ils ne contribueraient pas à l’atténuation du changement climatique (au moins pour la filière bois-énergie), mais de plus même si c’était le cas, ce serait au dépend de la protection d’écosystèmes sains et aussi de la protection de l’eau.
Pour rappel ces critères sont les suivants :
1. Atténuation du changement climatique
2. Adaptation au changement climatique
3. Utilisation durable et protection de l’eau et des ressources marines
4. Transition vers une économie circulaire, prévention et recyclage des déchets
5. Prévention et réduction de la pollution
6. Protection des écosystèmes sains
De plus pour être considérée comme verte une activité doit satisfaire à au moins un de ces critères sans contrevenir à aucun des autres.
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Les auteurs démontrent que la poursuite de l’objectif d’atténuation du réchauffement climatique implique une foresterie qui respecte les équilibres écologiques des systèmes forestiers et en préserve la biodiversité. Mais qu’en serait-il si cela était l’inverse et que soit plus performante pour atténuer le réchauffement climatique une sylviculture productiviste maximisant les volumes récoltés, des cycles courts avec coupes rases pour décarboner l’énergie ? Devrait-on sacrifier la biodiversité et la naturalité des forêts sur l’autel de la «lutte contre le changement climatique » ?
Comme les Amis de la Terre sont impliqués par ce rapport, je présume, peut-être à tort, que la réponse serait positive. Quoi qu’il en soit, il est évident que dans la stratégie développée dans ce rapport comme dans les stratégies concurrentes qui font bon marché de la naturalité et de la biodiversité, la préoccupation principale n’est pas une bonne préservation des écosystèmes forestiers et la préservation de leur naturalité. Celle-ci est subordonnée à un objectif d’atténuation du réchauffement climatique qui est premier, prioritaire. Il n’est nullement remis en cause dans ce rapport et c’est ce qui en fait les limites.
Il présente une stratégie gagnant/gagnant pour l’atténuation du RC et la préservation des écosystèmes forestiers. On peut aussi considérer qu’il s’agit en proposant une telle stratégie de sauver la forêt que les stratégies gouvernementales d’atténuation du RC et de décarbonation de l’énergie risquent de mettre à mal. Hélas, ce sont ces dernières qui ont bien plus de chance d’être appliquées.
Misère de ces temps de panique, où toute politique de protection de la nature et des paysages doit passer sous les fourches caudines du sauvetage du climat !
Crédit photo : SOS FORÊT France
Dimanche 30 Janvier 2022
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