La plante à l'honneur
Vous ne trouverez pas sur le pas de votre porte les deux plantes qui sont à l’honneur aujourd’hui. Elles ne poussent que sur quelques crêtes pierreuses, des rocailles ou des éboulis d’altitude dans les Alpes du sud. Ce sont des « endémiques » et elles sont rares. Deux plantes endémiques rares ensemble sur la même crête, ce n’est pas si fréquent. Elles méritent bien un effort pour aller les contempler : 1200 mètres de dénivelés environ à grimper ; une splendide ballade au cours de laquelle vous pourrez découvrir une autre endémique des Alpes du sud. Partons donc ensemble à leur découverte.
Fleur de géranium argenté
Cinq heures du matin. En ce début juillet…
Déjà le ciel s’éclaircit. Il fait doux et même un peu frais. Pourtant dans quelques heures, ici, il fera très chaud. Tout le petit peuple de la nuit regagne ses pénates. Vous bouclez la ceinture ventrale de votre sac. C’est parti.
Dès les premiers mètres, le sentier grimpe fort et s’élève en quelques lacets secs taillés dans la falaise. Vous prenez rapidement de la hauteur et la vallée se dévoile à votre vue, nimbée du rose de l’aurore. La montée devient moins rude. Par place des filets d’eau ruissellent le long de la roche et la végétation change brusquement du tout au tout : voici des orchis, des aulnes tandis que la paroi s’orne de magnifiques saxifrages à feuilles en languettes (Saxifraga linguata Brell.). Cette saxifrage est une endémique provenço-ligure. Bien sûr, ce sont les magnifiques grappes de fleurs blanches suspendues dans le vide qui ont attiré votre œil mais les rosettes de feuilles d’où s’élancent les tiges florales méritent elles aussi votre attention. Elles sont ponctuées sur les bords de la face supérieure d’une rangée de pores bordés de concrétions calcaires. Cette plante a la propriété de rejeter le calcaire en excès qu’elle a absorbé et qui sinon l’empoisonnerait. Elle peut ainsi prospérer sur des substrats très riches en calcaire que ne supporteraient pas d’autres plantes.
Une forêt naturelle… en apparence
Le sentier serpente maintenant dans une forêt où domine presque sans partage, le mélèze. Vous remarquerez que les arbres ont presque tous le même âge. Cette forêt n’a, malgré les apparences, rien de naturel. Ces montagnes avaient été totalement déboisées depuis le XIIIe avec des conséquences catastrophiques. Il a fallu attendre le XIXe pour que l’Etat lance, avec la RTM (la restauration des terrains de montagne) un grand programme de reboisement qui s’est réalisé au début contre les populations locales, notamment les éleveurs qui se voyaient dépossédés d’une partie de leurs pacages. Il faut savoir aussi que le mélèze est en quelque sorte l’enfant chéri des montagnards. Le sous-bois des mélézins, à la différence par exemple de celui des épicéas, permet le pâturage. Le bois de mélèze très résistant était employé pour la charpente, les bardeaux des toitures. On fabriquait avec son bois du mobilier, des abreuvoirs, lavoirs, etc. Enfin, cerise sur le gâteau, le mélèze est aussi un excellent bois de chauffage. Sans l’intervention de l’homme, les mélézins, formations pionnières, laisseraient la place à des pessières – sapinières ; les sapins et pins poussant sous le couvert des mélèzes, essences de lumière qui se régénèrent difficilement sous eux-mêmes. A l’état naturel, le mélèze est, lui aussi, un endémique des Alpes. Naturel ou non, vous trouvez ce mélézin bien agréable avec son sous-bois luxuriant et son ombre légère. Il faut en profiter car déjà le soleil tape fort et bientôt vous allez cheminer à découvert pour surmonter une barre rocheuse parsemée de touffes de sarriette, de serpolet et de lavande.
Déjà le ciel s’éclaircit. Il fait doux et même un peu frais. Pourtant dans quelques heures, ici, il fera très chaud. Tout le petit peuple de la nuit regagne ses pénates. Vous bouclez la ceinture ventrale de votre sac. C’est parti.
Dès les premiers mètres, le sentier grimpe fort et s’élève en quelques lacets secs taillés dans la falaise. Vous prenez rapidement de la hauteur et la vallée se dévoile à votre vue, nimbée du rose de l’aurore. La montée devient moins rude. Par place des filets d’eau ruissellent le long de la roche et la végétation change brusquement du tout au tout : voici des orchis, des aulnes tandis que la paroi s’orne de magnifiques saxifrages à feuilles en languettes (Saxifraga linguata Brell.). Cette saxifrage est une endémique provenço-ligure. Bien sûr, ce sont les magnifiques grappes de fleurs blanches suspendues dans le vide qui ont attiré votre œil mais les rosettes de feuilles d’où s’élancent les tiges florales méritent elles aussi votre attention. Elles sont ponctuées sur les bords de la face supérieure d’une rangée de pores bordés de concrétions calcaires. Cette plante a la propriété de rejeter le calcaire en excès qu’elle a absorbé et qui sinon l’empoisonnerait. Elle peut ainsi prospérer sur des substrats très riches en calcaire que ne supporteraient pas d’autres plantes.
Une forêt naturelle… en apparence
Le sentier serpente maintenant dans une forêt où domine presque sans partage, le mélèze. Vous remarquerez que les arbres ont presque tous le même âge. Cette forêt n’a, malgré les apparences, rien de naturel. Ces montagnes avaient été totalement déboisées depuis le XIIIe avec des conséquences catastrophiques. Il a fallu attendre le XIXe pour que l’Etat lance, avec la RTM (la restauration des terrains de montagne) un grand programme de reboisement qui s’est réalisé au début contre les populations locales, notamment les éleveurs qui se voyaient dépossédés d’une partie de leurs pacages. Il faut savoir aussi que le mélèze est en quelque sorte l’enfant chéri des montagnards. Le sous-bois des mélézins, à la différence par exemple de celui des épicéas, permet le pâturage. Le bois de mélèze très résistant était employé pour la charpente, les bardeaux des toitures. On fabriquait avec son bois du mobilier, des abreuvoirs, lavoirs, etc. Enfin, cerise sur le gâteau, le mélèze est aussi un excellent bois de chauffage. Sans l’intervention de l’homme, les mélézins, formations pionnières, laisseraient la place à des pessières – sapinières ; les sapins et pins poussant sous le couvert des mélèzes, essences de lumière qui se régénèrent difficilement sous eux-mêmes. A l’état naturel, le mélèze est, lui aussi, un endémique des Alpes. Naturel ou non, vous trouvez ce mélézin bien agréable avec son sous-bois luxuriant et son ombre légère. Il faut en profiter car déjà le soleil tape fort et bientôt vous allez cheminer à découvert pour surmonter une barre rocheuse parsemée de touffes de sarriette, de serpolet et de lavande.
Le géranium argenté
Avant d’entrer de nouveau sous le couvert du mélézin, vous vous accordez une pause. Le sentier serpente dans le sous-bois. Vous côtoyez des géraniums sanguins, des géraniums des bois, des raiponces de Haller aux épis d’un beau violet sombre, des renoncules et des trolles, ces gros « boutons d’or », et bien d’autres encore. Chacune de ces plantes est une petite merveille et mérite beaucoup d’attention mais aujourd’hui, vous avez un but précis. Jamais vous ne l’atteindrez si vous vous attardez comme vous y incitent toutes ces beautés de la nature et les papillons qui les survolent ou viennent s’y gorger de nectar au risque de succomber sous les crochets d’une araignée crabe en embuscade dans leur corolle.
Attention aux mollets des imprudent(e)s qui se promènent en short. Voici des orties et un véritable champ d’épinards et d’oseilles sauvages, un reposoir des troupeaux qu’il faut franchir. Vous cheminez maintenant sur un replat. Le sentier n’est plus qu’une trace au milieu des hautes herbes d’une prairie que colorent marguerites, centaurées, bistortes, lys martagons… Une symphonie dont les musiciens-compositeurs sont les criquets chanteurs, une symphonie aussi de couleurs et d’odeurs. Encore un raidillon, un replat et vous arrivez à une petite cabane pastorale, l’endroit idéal pour faire une nouvelle pause et se restaurer. La pente au-dessus de la cabane vous parait bien raide, brulée par un soleil implacable, la végétation rase et sans charme, orties, cirses très épineux, grémils… Tandis qu’en dessous, la forêt semble pleine de charmes. Ne vous laissez pas abuser, il est temps de repartir vers la crête qui n’est plus très loin. D’ailleurs vous retrouvez bientôt un bon sentier bien tracé qui traverse des prairies ou domine le jaune vif des clochettes des rhinanthes crête de coq.
Enfin la crête…. et au creux d’une légère dépression les premières touffes de géranium argentés !
Son nom botanique, geranium argenteum, L. fait référence à son aspect. Il appartient à la famille des géraniacées (geraniaceae). Quant au substantif geranium, il a pour origine un terme grec signifiant « grue » allusion à son fruit en forme de bec de grue.
Le géranium argenté fleurit entre mai et août. Dans les Alpes de Haute Provence, c’est au début du mois de juillet que la floraison est à son optimum.
Son habitat, ce sont les sommets, crêtes, et cols rocailleux et caillouteux calcaires entre 2100 et 2700 mètres d’altitude. Rarissime en France, on le trouve dans quelques stations dans les Hautes Alpes et Alpes de Haute Provence. Sa présence est aussi signalée dans les Apennins, le nord des Alpes italiennes et en Slovénie.
C’est une petite plante vivace, tomenteuse. Comme son nom l’indique, elle a un aspect blanc argenté. Selon les flores, elle est dotée d’une souche épaisse mais comme vous respectez cette rareté, vous n’allez pas vérifier… Les tiges sont presque nulles, les feuilles sont presque toutes à la base, orbiculaires, palmatiséquées (fendues très profondément), à cinq à sept segments trifides à lobes écartés. Les fleurs sont grandes, rose pâle, presque blanches sur des pédoncules biflores. Les pétales échancrés dépassent largement le calice.
Ses feuilles servent de plat de résistance à des insectes vivant sur les hauteurs. Il resterait à déterminer lesquels. Pour les humains, il est sans utilité particulière. Si ce n’est le plaisir de le contempler. Et c’est très bien ainsi. Il est protégé au plan national et figure sur le Livre Rouge de la flore menacée en France. Donc, ne pas le cueillir, éviter de le piétiner, marquer la plus grande attention à son égard.
Avant d’entrer de nouveau sous le couvert du mélézin, vous vous accordez une pause. Le sentier serpente dans le sous-bois. Vous côtoyez des géraniums sanguins, des géraniums des bois, des raiponces de Haller aux épis d’un beau violet sombre, des renoncules et des trolles, ces gros « boutons d’or », et bien d’autres encore. Chacune de ces plantes est une petite merveille et mérite beaucoup d’attention mais aujourd’hui, vous avez un but précis. Jamais vous ne l’atteindrez si vous vous attardez comme vous y incitent toutes ces beautés de la nature et les papillons qui les survolent ou viennent s’y gorger de nectar au risque de succomber sous les crochets d’une araignée crabe en embuscade dans leur corolle.
Attention aux mollets des imprudent(e)s qui se promènent en short. Voici des orties et un véritable champ d’épinards et d’oseilles sauvages, un reposoir des troupeaux qu’il faut franchir. Vous cheminez maintenant sur un replat. Le sentier n’est plus qu’une trace au milieu des hautes herbes d’une prairie que colorent marguerites, centaurées, bistortes, lys martagons… Une symphonie dont les musiciens-compositeurs sont les criquets chanteurs, une symphonie aussi de couleurs et d’odeurs. Encore un raidillon, un replat et vous arrivez à une petite cabane pastorale, l’endroit idéal pour faire une nouvelle pause et se restaurer. La pente au-dessus de la cabane vous parait bien raide, brulée par un soleil implacable, la végétation rase et sans charme, orties, cirses très épineux, grémils… Tandis qu’en dessous, la forêt semble pleine de charmes. Ne vous laissez pas abuser, il est temps de repartir vers la crête qui n’est plus très loin. D’ailleurs vous retrouvez bientôt un bon sentier bien tracé qui traverse des prairies ou domine le jaune vif des clochettes des rhinanthes crête de coq.
Enfin la crête…. et au creux d’une légère dépression les premières touffes de géranium argentés !
Son nom botanique, geranium argenteum, L. fait référence à son aspect. Il appartient à la famille des géraniacées (geraniaceae). Quant au substantif geranium, il a pour origine un terme grec signifiant « grue » allusion à son fruit en forme de bec de grue.
Le géranium argenté fleurit entre mai et août. Dans les Alpes de Haute Provence, c’est au début du mois de juillet que la floraison est à son optimum.
Son habitat, ce sont les sommets, crêtes, et cols rocailleux et caillouteux calcaires entre 2100 et 2700 mètres d’altitude. Rarissime en France, on le trouve dans quelques stations dans les Hautes Alpes et Alpes de Haute Provence. Sa présence est aussi signalée dans les Apennins, le nord des Alpes italiennes et en Slovénie.
C’est une petite plante vivace, tomenteuse. Comme son nom l’indique, elle a un aspect blanc argenté. Selon les flores, elle est dotée d’une souche épaisse mais comme vous respectez cette rareté, vous n’allez pas vérifier… Les tiges sont presque nulles, les feuilles sont presque toutes à la base, orbiculaires, palmatiséquées (fendues très profondément), à cinq à sept segments trifides à lobes écartés. Les fleurs sont grandes, rose pâle, presque blanches sur des pédoncules biflores. Les pétales échancrés dépassent largement le calice.
Ses feuilles servent de plat de résistance à des insectes vivant sur les hauteurs. Il resterait à déterminer lesquels. Pour les humains, il est sans utilité particulière. Si ce n’est le plaisir de le contempler. Et c’est très bien ainsi. Il est protégé au plan national et figure sur le Livre Rouge de la flore menacée en France. Donc, ne pas le cueillir, éviter de le piétiner, marquer la plus grande attention à son égard.
La bérardie laineuse
La bérardie laineuse
Vous avez photographié les géraniums avec toutes les précautions nécessaires pour ne rien dégrader. Vous reprenez votre ascension en suivant le fil de la crête qui bientôt se redresse. Et là, au plus fort de la pente, bérardies laineuses et géraniums argentés se côtoient. J’en conviens : on peut trouver des bérardies laineuses en des stations plus accessibles mais ce ne sont pas des stations où elles voisinent avec des géraniums argentés.
Le nom botanique de la bérardie laineuse est Berardia subacaulis Vill. 1777.
Elle a été décrite pour la première fois en 1777 par un botaniste dauphinois Dominique Villars qui l’a dédiée, elle qui ne demandait rien, à un autre botaniste dauphinois – il était aussi pharmacien – dénommé Bérard. Subacaulis parce que la tige de la fleur est quasi inexistante. L’espèce subacaulis est la seule et unique espèce du genre Berardia. Elle appartient à la famille des asteraceae, naguère les composées. On la nomme aussi « chardon de Bérard »
Elle fleurit de juin à août. Dans les Alpes méridionales françaises, c’est en juillet que la floraison est à son optimum.
Son habitat, ce sont les rocailles et éboulis calcaires ou schisteux subalpins entre 1800 et 2700 mètres d’altitude. On la trouve dans quelques stations en Isère, Hautes Alpes, Alpes de Haute Provence, Alpes Maritimes et au Piémont italien.
Voici sa diagnose d’après l’abbé H. Costes : « Plante vivace à tige presque nulle ou atteignant 15 cm. [Tous les spécimens que j’ai rencontré avaient des tiges presque nulle], monocéphale, feuilles blanches-tomenteuses sur les deux faces, verdâtres en dessus, fortement nervées, très largement ovales ou suborbiculaires, entières ou faiblement dentées, les caulinaires pétiolées à lobe un peu décurrent ; involucre [capitule] gros, globuleux, à folioles tomenteuses étroitement lancéolées, longuement acuminées, très aiguës, achaines jaunâtres, glabres, long de 10 mm environ ; fleurs blanchâtres ». Selon moi et aussi d’autres observateurs, les capitules sont plutôt jaune clair. On peut voir aussi, parfois, le gros pivot de sa racine à moitié découvert dans les éboulis.
De toute façon, celui qui s’intéresse aux plantes ne peut pas ne pas la remarquer lorsqu’il la rencontre pour la première fois. Il ne peut pas non plus se tromper pour l’identifier : elle ne ressemble à aucune autre plante alpine !
Plante rare avec une aire de répartition restreinte, la bérardie laineuse bénéficie d’un statut de protection nationale. Elle est aussi inscrite au Livre rouge de la flore menacée de France.
L’origine de cette plante a provoqué beaucoup de débats. Selon l’hypothèse retenue aujourd’hui elle serait une relique datant de la surrection des Alpes. En la contemplant, vous voilà au tertiaire dont elle l’est l’une des survivantes, peut-être la seule. À cette époque régnait sur les Alpes un climat subtropical et la plante s’est adaptée pour survivre à la chaleur et à la sécheresse. Sa chance fut que cette adaptation lui permette de résister aussi au froid et de faire face aux conditions extrêmes de la vie en montagne en des stations bien peu hospitalières où elle n’a guère de concurrence. Ce sont les petits poils de ses feuilles lui conférant cet aspect cotonneux caractéristique qui contribueraient à emmagasiner l'humidité ambiante. Ils la protégeraient contre les températures basses et le dessèchement dû au vent. Voici donc une plante bien étrange au destin fascinant. Il serait regrettable que la pression anthropique soit à l’origine de sa disparition.
Vous avez photographié les géraniums avec toutes les précautions nécessaires pour ne rien dégrader. Vous reprenez votre ascension en suivant le fil de la crête qui bientôt se redresse. Et là, au plus fort de la pente, bérardies laineuses et géraniums argentés se côtoient. J’en conviens : on peut trouver des bérardies laineuses en des stations plus accessibles mais ce ne sont pas des stations où elles voisinent avec des géraniums argentés.
Le nom botanique de la bérardie laineuse est Berardia subacaulis Vill. 1777.
Elle a été décrite pour la première fois en 1777 par un botaniste dauphinois Dominique Villars qui l’a dédiée, elle qui ne demandait rien, à un autre botaniste dauphinois – il était aussi pharmacien – dénommé Bérard. Subacaulis parce que la tige de la fleur est quasi inexistante. L’espèce subacaulis est la seule et unique espèce du genre Berardia. Elle appartient à la famille des asteraceae, naguère les composées. On la nomme aussi « chardon de Bérard »
Elle fleurit de juin à août. Dans les Alpes méridionales françaises, c’est en juillet que la floraison est à son optimum.
Son habitat, ce sont les rocailles et éboulis calcaires ou schisteux subalpins entre 1800 et 2700 mètres d’altitude. On la trouve dans quelques stations en Isère, Hautes Alpes, Alpes de Haute Provence, Alpes Maritimes et au Piémont italien.
Voici sa diagnose d’après l’abbé H. Costes : « Plante vivace à tige presque nulle ou atteignant 15 cm. [Tous les spécimens que j’ai rencontré avaient des tiges presque nulle], monocéphale, feuilles blanches-tomenteuses sur les deux faces, verdâtres en dessus, fortement nervées, très largement ovales ou suborbiculaires, entières ou faiblement dentées, les caulinaires pétiolées à lobe un peu décurrent ; involucre [capitule] gros, globuleux, à folioles tomenteuses étroitement lancéolées, longuement acuminées, très aiguës, achaines jaunâtres, glabres, long de 10 mm environ ; fleurs blanchâtres ». Selon moi et aussi d’autres observateurs, les capitules sont plutôt jaune clair. On peut voir aussi, parfois, le gros pivot de sa racine à moitié découvert dans les éboulis.
De toute façon, celui qui s’intéresse aux plantes ne peut pas ne pas la remarquer lorsqu’il la rencontre pour la première fois. Il ne peut pas non plus se tromper pour l’identifier : elle ne ressemble à aucune autre plante alpine !
Plante rare avec une aire de répartition restreinte, la bérardie laineuse bénéficie d’un statut de protection nationale. Elle est aussi inscrite au Livre rouge de la flore menacée de France.
L’origine de cette plante a provoqué beaucoup de débats. Selon l’hypothèse retenue aujourd’hui elle serait une relique datant de la surrection des Alpes. En la contemplant, vous voilà au tertiaire dont elle l’est l’une des survivantes, peut-être la seule. À cette époque régnait sur les Alpes un climat subtropical et la plante s’est adaptée pour survivre à la chaleur et à la sécheresse. Sa chance fut que cette adaptation lui permette de résister aussi au froid et de faire face aux conditions extrêmes de la vie en montagne en des stations bien peu hospitalières où elle n’a guère de concurrence. Ce sont les petits poils de ses feuilles lui conférant cet aspect cotonneux caractéristique qui contribueraient à emmagasiner l'humidité ambiante. Ils la protégeraient contre les températures basses et le dessèchement dû au vent. Voici donc une plante bien étrange au destin fascinant. Il serait regrettable que la pression anthropique soit à l’origine de sa disparition.
Cet hiver, lorsque les mélèzes auront perdu leurs aiguilles et que la neige recouvrira cette montagne, lorsque vous archiverez vos photographies, vous revivrez cette belle journée de juillet où nous avons découvert ensemble, ces deux plantes à la fois si rares et si abondantes dans les stations qu’elles ont choisies ou peut-être dans lesquelles elles ont été reléguées. En attendant trouvons un coin d’herbe un peu confortable et déjeunons ensemble. Puis après une petite sieste, il sera temps de redescendre dans la vallée.
Vendredi 24 Juin 2011
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