Nature - environnement
Une actualisation de la liste rouge des espèces de mammifères menacées en France qui datait de huit ans vient d’être rendue publique. Elle a été élaborée par le Comité Français de l’UICN et le Muséum national d’histoire naturelle en partenariat avec la Société Française pour l’étude et la protection des mammifères et l’Office national de la Chasse et de la faune sauvage. Sans surprise, cette actualisation met en évidence une aggravation de la situation notamment pour les espèces terrestres. Les plans climats et le développement de l’éolien s’ajoutent maintenant aux autres causes de pression sur les espèces sauvages. Les chauves-souris sont particulièrement affectées. Elles sont les premières victimes de la transition énergétique et d’une lutte contre le changement climatique qui s’effectuent aux dépens de la préservation de la Nature.
Les deux extraits suivants de la présentation de cette liste rouge actualisée le montre de façon criante (Sous-titres ajoutés et passages soulignés par moi JFD).
Les chauves-souris victimes de la transition énergétiques et du plan climat
« Sur les 34 espèces de chauves-souris présentes en France, 8 sont aujourd’hui menacées et 8 autres quasi menacées, contre 4 et 7 respectivement lors de la précédente évaluation. Cette évolution traduit en partie l'amélioration des connaissances sur ces espèces. Mais pour beaucoup, l'aggravation est causée par la disparition des habitats qu’elles affectionnent, du fait de l’isolation et de la rénovation des bâtiments et de l’exploitation forestière réduisant l’abondance des vieux arbres. Dans d’autres cas, le développement du secteur éolien est en cause, touchant particulièrement les espèces migratrices, victimes notamment de collisions avec les pales. Ainsi, parmi les chauves-souris dont la situation s’est dégradée en moins de dix ans, le Molosse de Cestoni est passé de “Préoccupation mineure” à “Quasi menacé” et la Noctule commune de “Quasi menacée” à “Vulnérable” ».
Le cas de la Noctule commune (Nyctalus noctula)
« Bien qu’encore assez largement répandue en France, la Noctule commune est l’une des chauves-souris dont la situation est la plus préoccupante à long terme. Le développement de la production d’énergie éolienne a particulièrement affecté cette espèce migratrice de haut vol, victime de collisions avec les pales des machines. Dans tous les pays, elle figure dans le trio des espèces les plus touchées par cette industrie en pleine expansion. En milieu urbain, elle colonise les parties hautes des immeubles et se trouve confrontée à la mise en œuvre des mesures d'isolation du “Plan climat” : elle risque d’une part d'être emmurée lors des travaux et d’autre part de voir les gîtes qu’elle occupe disparaître progressivement des villes. Elle est aussi menacée par l’abattage d’arbres en zone urbaine et ponctuellement par les travaux de rénovation des châteaux d’eau. Autre menace nouvelle, avec le développement des poêles à bois et des inserts, les conduits de chauffage devant être tubés transforment les installations en pièges potentiels pour les chauves-souris, ce qui affecte particulièrement cette espèce. Le déclin des effectifs de la Noctule commune s’est significativement accru au cours des dernières années. Identifiée en catégorie “Quasi menacée” lors de la précédente évaluation, l’espèce est désormais classée “Vulnérable” suite à la réactualisation de son statut dans la Liste rouge nationale. La mise en place d'actions de conservation et d'un suivi vigilant de l'évolution de ses populations dans les années à venir est indispensable. »
Les chauves-souris victimes de la transition énergétiques et du plan climat
« Sur les 34 espèces de chauves-souris présentes en France, 8 sont aujourd’hui menacées et 8 autres quasi menacées, contre 4 et 7 respectivement lors de la précédente évaluation. Cette évolution traduit en partie l'amélioration des connaissances sur ces espèces. Mais pour beaucoup, l'aggravation est causée par la disparition des habitats qu’elles affectionnent, du fait de l’isolation et de la rénovation des bâtiments et de l’exploitation forestière réduisant l’abondance des vieux arbres. Dans d’autres cas, le développement du secteur éolien est en cause, touchant particulièrement les espèces migratrices, victimes notamment de collisions avec les pales. Ainsi, parmi les chauves-souris dont la situation s’est dégradée en moins de dix ans, le Molosse de Cestoni est passé de “Préoccupation mineure” à “Quasi menacé” et la Noctule commune de “Quasi menacée” à “Vulnérable” ».
Le cas de la Noctule commune (Nyctalus noctula)
« Bien qu’encore assez largement répandue en France, la Noctule commune est l’une des chauves-souris dont la situation est la plus préoccupante à long terme. Le développement de la production d’énergie éolienne a particulièrement affecté cette espèce migratrice de haut vol, victime de collisions avec les pales des machines. Dans tous les pays, elle figure dans le trio des espèces les plus touchées par cette industrie en pleine expansion. En milieu urbain, elle colonise les parties hautes des immeubles et se trouve confrontée à la mise en œuvre des mesures d'isolation du “Plan climat” : elle risque d’une part d'être emmurée lors des travaux et d’autre part de voir les gîtes qu’elle occupe disparaître progressivement des villes. Elle est aussi menacée par l’abattage d’arbres en zone urbaine et ponctuellement par les travaux de rénovation des châteaux d’eau. Autre menace nouvelle, avec le développement des poêles à bois et des inserts, les conduits de chauffage devant être tubés transforment les installations en pièges potentiels pour les chauves-souris, ce qui affecte particulièrement cette espèce. Le déclin des effectifs de la Noctule commune s’est significativement accru au cours des dernières années. Identifiée en catégorie “Quasi menacée” lors de la précédente évaluation, l’espèce est désormais classée “Vulnérable” suite à la réactualisation de son statut dans la Liste rouge nationale. La mise en place d'actions de conservation et d'un suivi vigilant de l'évolution de ses populations dans les années à venir est indispensable. »
« Atténuation du changement climatique » versus « protection des chauve-souris » ?
● En ce qui concerne l’isolation du bâti, un des piliers de la transition énergétique, il est possible de gommer les impacts sur les chauve-souris en leur ménageant des habitats de substitution. Mais comme pour ce qui concerne la préservation du patrimoine bâti contre les ravalements-isolations de façades, encore faut-il le vouloir et que cela figure comme une obligation pour l’octroi de subventions et la délivrance des autorisations de travaux. Il est regrettable que l’on n’entende guère les grandes associations de protection de la Nature ou de défense de l’environnement sur ce sujet. Quant aux écologistes main stream, ils sont prêts à tout sacrifier (en fait renier) pour cette transition énergétique qui oublie précisément d’être « écologique ».
● En France, quel que soit le gouvernement, l’Etat compte beaucoup sur la filière bois/énergie pour atteindre les objectifs du PNA EnR (en clair : Plan d’action national en faveur des énergies renouvelables). En 2020, il est prévu que la filière bois énergie ait une part majoritaire dans les 23% d’EnR prévus de la consommation finale brute d’énergie par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ceci suppose une exploitation considérablement accrue des forêts qui tendra vers une gestion productiviste de celles-ci au détriment de leur biodiversité. Il est évident qu’avec une telle gestion, il faut malheureusement s’attendre à une dégradation accélérée des habitats forestiers toute espèce confondue et donc de celui des chauves-souris.
● Ironie de l’histoire, si le bois est bien une EnR à condition le prélèvement soit inférieur à l’accroissement naturel, il est loin d’être une énergie « décarbonnée » comme l’on peut le comprendre en lisant l’article de Naudts et al.(2016), article qui jeta un pavé dans la mare de la sylviculture productiviste mais qui semble oublié aujourd’hui. (Voir mon article « Gestion des forêts française et changement climatique » (§ IV – VII) sur ce blog). Néanmoins comme l’amalgame entre « décarbonné » et « renouvelable » semble bien installé dans la tête des technocrates, des décideurs et de beaucoup d’ONG, la filière bois/énergie a de beaux jours devant elle et les espèces sauvages dont l’habitat est partiellement ou totalement forestier continueront à décliner.
● Pour les chauves-souris, le développement de cette filière a d’autres conséquences néfastes dues au développement du chauffage au bois. Comme je l’ai souligné dans l’extrait cité : « Autre menace nouvelle, avec le développement des poêles à bois et des inserts, les conduits de chauffage devant être tubés transforment les installations en pièges potentiels pour les chauves-souris », cette menace nouvelle affectant particulièrement la Noctule commune. On devrait facilement trouver des dispositifs pour remédier à cet état de chose mais encore faudrait avoir la volonté de les mettre en œuvre en rendant leur installation obligatoire.
● L’éolien, véritable calamité pour de nombreuses espèces de chauves-souris mérite un développement à part car c’est de loin la menace la plus grave qui pèse sur une majorité d’espèces de chauve-souris. Elle peut même conduire à la disparition de celles qui, menacée par ailleurs, ont de faibles effectifs.
Or par leur rôle de prédateur, notamment insectivore, les chauves-souris sont un élément essentiel de la résilience des écosystèmes. Ce sont des animaux à protéger, ne serait-ce que pour des raisons bien égoïstes : ils nous sont utiles. Par exemple, une pipistrelle de 8 grammes dévore chaque nuit l’équivalent du quart de son poids en moustiques. Les populations de pipistrelles sont particulièrement touchées par les parcs d’aérogénérateurs.
Le fléau de l’éolien terrestre ou maritime
Le développement de l’industrie éolienne est un véritable fléau pour les populations de chauves-souris. Une fois l’éolienne construite, il n’y a pratiquement pas de solution pour éviter le carnage si elle est construite à un mauvais endroit.
Il n’y a aucun moyen, visuel (lumière) ou électromagnétique efficace pour les éloigner de l’engin et on ignore quel pourrait être l’impact de ceux qui ont été testés sur les autres vivants, y compris les populations humaines riveraines. Aucun ne peut aujourd’hui être considéré comme une stratégie de réduction concrète pour éviter la mortalité de chauves-souris. D’ailleurs, ce qui attire les chauves-souris vers les éoliennes reste un mystère.
Les seules mesures de « réduction » connues qui semblent efficaces (mais réduction de la mortalité jusqu’à 50% seulement) sont la mise en drapeau dans des conditions de températures et d’humidité qui peuvent varier d’un site à l’autre et l’augmentation de la vitesse du vent nécessaire au démarrage de l’éolienne. Cependant, elles réduisent la production de l’engin et donc sa rentabilité. Néanmoins pour les parcs d’aérogénérateurs qui ont été érigés dans des zones sensibles, ces mesures devraient être obligatoires mais elles ne le sont pas.
En fait, le déploiement des éoliennes industrielles s’est effectué sans que l’on se doute de la mortalité qu’elles induiraient chez les chauves-souris et aujourd’hui encore on sait peu de choses sur les raisons de cet impact même si nos connaissances sur la biologie de ces mammifères a fait beaucoup de progrès.
Les mesures de réductions ayant un effet limité et les mesures de compensations étant non pertinentes en la circonstance, si l’on veut protéger efficacement ces mammifères, il est nécessaire de prévenir. C’est donc sur l’évitement qu’il faut insister quitte à renoncer au projet à l’endroit initialement prévu lorsque cet évitement ne serait pas possible ou s’avérerait insuffisant. Pour cela il est impératif que les études d’impact d’un projet comportent un volet spécifique « chauves-souris » avec des règles précises et contraignantes pour sa réalisation.
Rappelons que TOUTES les chauves-souris sont protégées individuellement par la législation internationale et nationale, elles ne doivent pas être tuées intentionnellement. Il en résulte que « fixer des seuils généraux pour la mortalité des chauves-souris et/ou une vitesse de vent qui déclencherait la réduction des mortalité est non seulement considéré comme arbitraire, inefficace, inadéquat et non soutenable mais aussi contestable d’un point de vue légal en Europe » (Rodrigues L. et al. 2015, p. 28).
Cela devrait conduire à l’abandon pur et simple de projets et les éoliennes industrielles dans des sites où elles risqueraient d’impacter les populations locales où sur les couloirs de migration. La durée de vie d’une éolienne industrielle étant de 20 ans, les éoliennes tueuses de chauves-souris (ou d’oiseaux) ne devraient pas être remplacées.
Les adulateurs de l’éolien ne sont pas disposés à de tels sacrifices et au contraire prêts même à en installer en forêt là où leur impact sur l’avifaune et les chiroptères est la plus forte. Souvenons-nous par exemple des efforts d’Henri Stoll membre d’EELV pour faire aboutir un projet de parc éolien en pleine forêt au col de la Croix Bonhomme dans les Vosges, projet finalement rejeté par le préfet. Henri Stoll avait été candidat à la primaire d’EELV en 2010 et se vantait de représenter « la base des écolos » (il a recueilli 5% des suffrages !!!). Aujourd’hui encore dans les Monts du Forez, au col de La Loge à la limite du Puy de Dôme et de la Loire, en forêt, un parc éolien est projeté en dépit du rejet des populations et des communes impactées.
Citons également comme cas d’école, la tentative pour implanter 6 éoliennes dont 3 en forêt et 3 à moins de 100 m de lisières forestières ou de haies en Bretagne (commune de Saint Georges de Rouelley et de Ger au Sud-Est de la Manche, en limite de l’Orne). Et ce n’est pas n’importe quelle forêt qui aurait été touchée mais une forêt résiduelle de crête du sud du massif armoricain, crête percée de galeries d’anciennes mines de fer servant aujourd’hui de gite à de nombreuses espèces de chauve-souris. Le parc d’aérogénérateur serait implanté à quelques encablures (1500 m) d’un des sites d’hibernation important de chiroptères au titre du réseau européen Natura 2000 dénommé « anciennes mines de Bion et de Barenton ». Les associations de protection de la nature et des paysages ont gagné leurs recours et le permis de construire a été annulé mais le maire de Saint-Georges-de-Rouelley ne se tient pas pour battu et alléché par les ressources fiscales espérées veut continuer le combat juridique. (Pour en savoir plus, voir les références au bas de l’article).
L’essor dans n’importe quelle condition de l’industrie éolienne censée proposer une énergie « propre » est emblématique de la « transition énergétique » à la mode de chez nous. L’impact sur les chauves-souris est exemplaire des ravages que cette transition peut causer sur notre territoire, ravages qui ne concernent pas seulement les chauves-souris, la faune ou la flore mais aussi les paysages et notre patrimoine architectural. Dans le cas de l’éolien, c’est aussi une atteinte à la tranquillité, la sécurité et la santé des riverains de ces machines dont l’implantation n’est pas assez rigoureusement réglementée.
Telle qu’elle est conçue et conduite avec l’éolien industriel comme emblème et la filière bois/énergie comme première source d’EnR, cette transition énergétique n’a rien d’une transition écologique. Pire qu’une caricature, elle en est le contraire ; une transition écologique devant avoir comme premier souci, celui de la Nature.
UICN France, MNHN, SFEPM & ONCFS (2017). La Liste rouge des espèces menacées en France – Chapitre Mammifères de France métropolitaine. Paris, France. https://inpn.mnhn.fr/docs/LR_F/Liste_rouge_France_Mammiferes_de_metropole_2017.pdf
J. F. Dumas (2016) « Gestion des forêts française et changement climatique » http://www.jfdumas.fr/Gestion-des-forets-francaises-et-changement-climatique_a374.html
L. Rodrigues, L. Bach, M.-J. Dubourg-Savage, B. Karapandža, D. Kovač, T. Kervyn, J. Dekker, A. Kepel, P. Bach, J. Collins, C. Harbusch, K. Park, B. Micevski, J. Minderman (2015). Lignes directrices pour la prise en compte des chauves-souris dans les projets éoliens. Actualisation 2015. EUROBATS Publication Series N° 6 (version française).UNEP/EUROBATS Secrétariat, Bonn, Allemagne, 133 p. http://www.sfepm.org/pdf/2015_FR_GuidelinesWTs_191215.pdf
Sur le cas des éoliennes de Ger et Saint Georges de Rouelly on peut consulter en ligne :
– Le site de la Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France (SPPEF), « Éoliennes : récit d’une victoire pour les paysages sur la crête de Domfront-Mortain (Manche) », http://www.sppef.fr/2017/04/23/eoliennes-recit-dune-victoire-pour-les-paysages-sur-la-crete-de-domfront-mortain-manche/
– Le site de Manche Nature : « Un projet éolien contestable » http://manche-nature.fr/projet-eolien-contestable/
Noctule commune : Mnolf/Wikimedia commons
Pipistrelle commune morte sous une éolienne : Groupe Mammalogique Normand
● En ce qui concerne l’isolation du bâti, un des piliers de la transition énergétique, il est possible de gommer les impacts sur les chauve-souris en leur ménageant des habitats de substitution. Mais comme pour ce qui concerne la préservation du patrimoine bâti contre les ravalements-isolations de façades, encore faut-il le vouloir et que cela figure comme une obligation pour l’octroi de subventions et la délivrance des autorisations de travaux. Il est regrettable que l’on n’entende guère les grandes associations de protection de la Nature ou de défense de l’environnement sur ce sujet. Quant aux écologistes main stream, ils sont prêts à tout sacrifier (en fait renier) pour cette transition énergétique qui oublie précisément d’être « écologique ».
● En France, quel que soit le gouvernement, l’Etat compte beaucoup sur la filière bois/énergie pour atteindre les objectifs du PNA EnR (en clair : Plan d’action national en faveur des énergies renouvelables). En 2020, il est prévu que la filière bois énergie ait une part majoritaire dans les 23% d’EnR prévus de la consommation finale brute d’énergie par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ceci suppose une exploitation considérablement accrue des forêts qui tendra vers une gestion productiviste de celles-ci au détriment de leur biodiversité. Il est évident qu’avec une telle gestion, il faut malheureusement s’attendre à une dégradation accélérée des habitats forestiers toute espèce confondue et donc de celui des chauves-souris.
● Ironie de l’histoire, si le bois est bien une EnR à condition le prélèvement soit inférieur à l’accroissement naturel, il est loin d’être une énergie « décarbonnée » comme l’on peut le comprendre en lisant l’article de Naudts et al.(2016), article qui jeta un pavé dans la mare de la sylviculture productiviste mais qui semble oublié aujourd’hui. (Voir mon article « Gestion des forêts française et changement climatique » (§ IV – VII) sur ce blog). Néanmoins comme l’amalgame entre « décarbonné » et « renouvelable » semble bien installé dans la tête des technocrates, des décideurs et de beaucoup d’ONG, la filière bois/énergie a de beaux jours devant elle et les espèces sauvages dont l’habitat est partiellement ou totalement forestier continueront à décliner.
● Pour les chauves-souris, le développement de cette filière a d’autres conséquences néfastes dues au développement du chauffage au bois. Comme je l’ai souligné dans l’extrait cité : « Autre menace nouvelle, avec le développement des poêles à bois et des inserts, les conduits de chauffage devant être tubés transforment les installations en pièges potentiels pour les chauves-souris », cette menace nouvelle affectant particulièrement la Noctule commune. On devrait facilement trouver des dispositifs pour remédier à cet état de chose mais encore faudrait avoir la volonté de les mettre en œuvre en rendant leur installation obligatoire.
● L’éolien, véritable calamité pour de nombreuses espèces de chauves-souris mérite un développement à part car c’est de loin la menace la plus grave qui pèse sur une majorité d’espèces de chauve-souris. Elle peut même conduire à la disparition de celles qui, menacée par ailleurs, ont de faibles effectifs.
Or par leur rôle de prédateur, notamment insectivore, les chauves-souris sont un élément essentiel de la résilience des écosystèmes. Ce sont des animaux à protéger, ne serait-ce que pour des raisons bien égoïstes : ils nous sont utiles. Par exemple, une pipistrelle de 8 grammes dévore chaque nuit l’équivalent du quart de son poids en moustiques. Les populations de pipistrelles sont particulièrement touchées par les parcs d’aérogénérateurs.
Le fléau de l’éolien terrestre ou maritime
Le développement de l’industrie éolienne est un véritable fléau pour les populations de chauves-souris. Une fois l’éolienne construite, il n’y a pratiquement pas de solution pour éviter le carnage si elle est construite à un mauvais endroit.
Il n’y a aucun moyen, visuel (lumière) ou électromagnétique efficace pour les éloigner de l’engin et on ignore quel pourrait être l’impact de ceux qui ont été testés sur les autres vivants, y compris les populations humaines riveraines. Aucun ne peut aujourd’hui être considéré comme une stratégie de réduction concrète pour éviter la mortalité de chauves-souris. D’ailleurs, ce qui attire les chauves-souris vers les éoliennes reste un mystère.
Les seules mesures de « réduction » connues qui semblent efficaces (mais réduction de la mortalité jusqu’à 50% seulement) sont la mise en drapeau dans des conditions de températures et d’humidité qui peuvent varier d’un site à l’autre et l’augmentation de la vitesse du vent nécessaire au démarrage de l’éolienne. Cependant, elles réduisent la production de l’engin et donc sa rentabilité. Néanmoins pour les parcs d’aérogénérateurs qui ont été érigés dans des zones sensibles, ces mesures devraient être obligatoires mais elles ne le sont pas.
En fait, le déploiement des éoliennes industrielles s’est effectué sans que l’on se doute de la mortalité qu’elles induiraient chez les chauves-souris et aujourd’hui encore on sait peu de choses sur les raisons de cet impact même si nos connaissances sur la biologie de ces mammifères a fait beaucoup de progrès.
Les mesures de réductions ayant un effet limité et les mesures de compensations étant non pertinentes en la circonstance, si l’on veut protéger efficacement ces mammifères, il est nécessaire de prévenir. C’est donc sur l’évitement qu’il faut insister quitte à renoncer au projet à l’endroit initialement prévu lorsque cet évitement ne serait pas possible ou s’avérerait insuffisant. Pour cela il est impératif que les études d’impact d’un projet comportent un volet spécifique « chauves-souris » avec des règles précises et contraignantes pour sa réalisation.
Rappelons que TOUTES les chauves-souris sont protégées individuellement par la législation internationale et nationale, elles ne doivent pas être tuées intentionnellement. Il en résulte que « fixer des seuils généraux pour la mortalité des chauves-souris et/ou une vitesse de vent qui déclencherait la réduction des mortalité est non seulement considéré comme arbitraire, inefficace, inadéquat et non soutenable mais aussi contestable d’un point de vue légal en Europe » (Rodrigues L. et al. 2015, p. 28).
Cela devrait conduire à l’abandon pur et simple de projets et les éoliennes industrielles dans des sites où elles risqueraient d’impacter les populations locales où sur les couloirs de migration. La durée de vie d’une éolienne industrielle étant de 20 ans, les éoliennes tueuses de chauves-souris (ou d’oiseaux) ne devraient pas être remplacées.
Les adulateurs de l’éolien ne sont pas disposés à de tels sacrifices et au contraire prêts même à en installer en forêt là où leur impact sur l’avifaune et les chiroptères est la plus forte. Souvenons-nous par exemple des efforts d’Henri Stoll membre d’EELV pour faire aboutir un projet de parc éolien en pleine forêt au col de la Croix Bonhomme dans les Vosges, projet finalement rejeté par le préfet. Henri Stoll avait été candidat à la primaire d’EELV en 2010 et se vantait de représenter « la base des écolos » (il a recueilli 5% des suffrages !!!). Aujourd’hui encore dans les Monts du Forez, au col de La Loge à la limite du Puy de Dôme et de la Loire, en forêt, un parc éolien est projeté en dépit du rejet des populations et des communes impactées.
Citons également comme cas d’école, la tentative pour implanter 6 éoliennes dont 3 en forêt et 3 à moins de 100 m de lisières forestières ou de haies en Bretagne (commune de Saint Georges de Rouelley et de Ger au Sud-Est de la Manche, en limite de l’Orne). Et ce n’est pas n’importe quelle forêt qui aurait été touchée mais une forêt résiduelle de crête du sud du massif armoricain, crête percée de galeries d’anciennes mines de fer servant aujourd’hui de gite à de nombreuses espèces de chauve-souris. Le parc d’aérogénérateur serait implanté à quelques encablures (1500 m) d’un des sites d’hibernation important de chiroptères au titre du réseau européen Natura 2000 dénommé « anciennes mines de Bion et de Barenton ». Les associations de protection de la nature et des paysages ont gagné leurs recours et le permis de construire a été annulé mais le maire de Saint-Georges-de-Rouelley ne se tient pas pour battu et alléché par les ressources fiscales espérées veut continuer le combat juridique. (Pour en savoir plus, voir les références au bas de l’article).
L’essor dans n’importe quelle condition de l’industrie éolienne censée proposer une énergie « propre » est emblématique de la « transition énergétique » à la mode de chez nous. L’impact sur les chauves-souris est exemplaire des ravages que cette transition peut causer sur notre territoire, ravages qui ne concernent pas seulement les chauves-souris, la faune ou la flore mais aussi les paysages et notre patrimoine architectural. Dans le cas de l’éolien, c’est aussi une atteinte à la tranquillité, la sécurité et la santé des riverains de ces machines dont l’implantation n’est pas assez rigoureusement réglementée.
Telle qu’elle est conçue et conduite avec l’éolien industriel comme emblème et la filière bois/énergie comme première source d’EnR, cette transition énergétique n’a rien d’une transition écologique. Pire qu’une caricature, elle en est le contraire ; une transition écologique devant avoir comme premier souci, celui de la Nature.
Sources et références
UICN France, MNHN, SFEPM & ONCFS (2017). La Liste rouge des espèces menacées en France – Chapitre Mammifères de France métropolitaine. Paris, France. https://inpn.mnhn.fr/docs/LR_F/Liste_rouge_France_Mammiferes_de_metropole_2017.pdf
J. F. Dumas (2016) « Gestion des forêts française et changement climatique » http://www.jfdumas.fr/Gestion-des-forets-francaises-et-changement-climatique_a374.html
L. Rodrigues, L. Bach, M.-J. Dubourg-Savage, B. Karapandža, D. Kovač, T. Kervyn, J. Dekker, A. Kepel, P. Bach, J. Collins, C. Harbusch, K. Park, B. Micevski, J. Minderman (2015). Lignes directrices pour la prise en compte des chauves-souris dans les projets éoliens. Actualisation 2015. EUROBATS Publication Series N° 6 (version française).UNEP/EUROBATS Secrétariat, Bonn, Allemagne, 133 p. http://www.sfepm.org/pdf/2015_FR_GuidelinesWTs_191215.pdf
Sur le cas des éoliennes de Ger et Saint Georges de Rouelly on peut consulter en ligne :
– Le site de la Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France (SPPEF), « Éoliennes : récit d’une victoire pour les paysages sur la crête de Domfront-Mortain (Manche) », http://www.sppef.fr/2017/04/23/eoliennes-recit-dune-victoire-pour-les-paysages-sur-la-crete-de-domfront-mortain-manche/
– Le site de Manche Nature : « Un projet éolien contestable » http://manche-nature.fr/projet-eolien-contestable/
Iconographie
Noctule commune : Mnolf/Wikimedia commons
Pipistrelle commune morte sous une éolienne : Groupe Mammalogique Normand
Cadavre de pipistrelle commune sous une éolienne
Vendredi 17 Novembre 2017
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