Le but de cet article n’est pas d’argumenter en faveur d’une politique familiale dénataliste, seule politique authentiquement écologiste. Le lecteur intéressé par cette question peut se reporter à un article de ce blog « Pas de transition écologique sans transition démographique ». L’objet de l’article qui suit est d’établir un constat : la politique familiale proposée par EELV n’est pas écologiste à la différence de celle défendue par le Mouvement Ecologiste Indépendant mais malheureusement ce parti peine à faire entendre ses propositions de telle sorte que pour les médias et donc l’opinion publique, est écologiste une politique qui soutient des propositions extrêmes sur le plan sociétal sans même s’interroger sur leurs incidences démographiques.


La politique familiale proposée aujourd’hui par EELV n’est pas écologiste !

On ne peut être écologiste sans proposer une politique familiale qui n’ait pas comme principe fondamental et comme étalon : la nécessaire dénatalité ou, dans une démarche de compromis, la stabilisation de la population à son niveau actuel bien que celui-ci soit trop élevé. Or, de cette dénatalité et de l’évaluation du bien-fondé des politiques familiales en fonction de l’objectif de réduction de la population, il n’est même pas question dans la tribune intitulée «Pour une politique familiale écologiste ! » parue sur le HuffingtonPost, reprise sur le site national d’EE/LV et censée exprimer la position actuelle de ce parti.

Tout d’abord, il est très discutable d’affirmer comme le font les auteurs du texte (Jean-Philippe MAGNEN, porte-parole national d’Europe-Ecologie Les Verts, Cyrielle CHATELAIN, responsable du Pôle social d’EELV et David BELLIARD, délégué EELV en charge de la protection sociale) que la politique actuelle est inefficace avec peu d’incidence sur la natalité. Si la France est vice-championne européenne pour son taux de fécondité et si, à l’inverse des autres pays européens, celui-ci n’a guère baissé malgré la crise, cela est dû selon les démographes de l’INSE et de l’INED, en partie au moins, à la politique familiale actuellement en vigueur. La politique familiale actuelle est nataliste et c’est pour cela qu’elle doit être revue.
Or, si EELV souhaite supprimer le quotient familial, ce n’est nullement parce que celui-ci peut avoir des effets incitatifs à la procréation mais seulement parce qu’il « bénéficie avant tout aux 10% des familles les plus riches ». D’ailleurs pour les auteurs du texte, il se saurait être question de supprimer aussi les allocations familiales mais, en contrepartie de la suppression du quotient familial de les donner « dès le premier enfant » et de les augmenter pour les « familles en situation de précarité ». Pour EELV cette ouverture de droits ne s’accompagnera pas d’une forte dégressivité dès le second enfant. En tout cas, il n’en est pas fait mention dans ce texte.
On peut disputer la question de savoir si ainsi réformées, les allocations familiales constitueraient une aide aux familles qui serait plus justement attribuée mais dans une politique écologiste, il ne faut pas mélanger politique familiale et solidarité. La solidarité vis-à-vis des personnes en difficulté économique doit s’exercer individuellement, en fonction de critères fondés sur les revenus et patrimoines de chacune de ces personnes.
Dans ce texte, les auteurs développent longuement leur conception d’une « aide à la parentalité » qui serait plus juste socialement, plus adaptée sociétalement. Mais pour un écologiste, les aides à la parentalité doivent d’abord être passées au crible pour déceler celles qui ont pour conséquence directe ou indirecte d’être aussi une incitation à la natalité. Cela n’est même pas envisagé dans cette tribune.
La dénatalité est l’impératif écologique premier, incontournable, fondamental parce que c’est une question de survie. Mais une politique résolument dénataliste se doit aussi d’être socialement juste et sociétalement adaptée, non seulement pour être applicable mais surtout pour être politiquement et moralement recevable. Une politique de ce genre sera d’autant plus difficile à mettre en œuvre que l’on tardera à le faire car les mesures à prendre seront de plus en plus drastiques.
Dans le texte de cette tribune censée représenter la position d’EELLV, il ne s’agit pas d’ouvrir des pistes pour définir une politique de ce type pour une raison simple : l’écologique est absent. Bien plus que supplanté, il est effacé par le social et le sociétal. Et, il en est sur ce sujet comme sur beaucoup d’autres. C’est pourquoi, il est assez insupportable d’y trouver des formules comme « les écologistes proposent », témoignant d’une appropriation indue de l’écologie politique par EELV comme si tous les écologistes se reconnaissaient dans ce parti et comme si ce parti avait le monopole de l’écologie politique alors que plus le temps passe, plus il s’en éloigne et la banalise en un brouet électoraliste insipide !
Désignons ce parti par son acronyme EELV, acronyme dont on oubliera à la longue le sens ; ce qui sera heureux car il ne mérite pas le qualificatif d’écologiste.

La politique familiale proposée par le MEI est écologiste mais manque d’ambition et est peu adaptée aux réalités familiales actuelles

Les analyses et propositions du MEI (Mouvement écologiste indépendant) sur la politique familiale sont, elles, véritablement écologistes. Le MEI s’inquiète de l’expansion démographique démesurée de l’espèce humaine. Voici un extrait de la motion sur les Allocations familiales adoptée par son Conseil national le 14 avril 2013 qui permet de le constater : « Néanmoins, partisans d’une réforme (des allocations familiales et partisans du statu quo semblent se retrouver sur le principe même d’une aide publique aux familles nombreuses, principe admis comme une évidence nationale consensuelle.
L’encouragement de la natalité par l’État français s’est pourtant développé dans un contexte historique et idéologique bien déterminé : celui du développement simultané d’un capitalisme industriel avide de bras et plus tard de consommateurs, et d’un militarisme gourmand en chair à canon, le tout sous le regard complaisant des institutions religieuses.
A la critique pionnière de ce natalisme par le courant néo-malthusien dès la première moitié du XXe siècle se sont ajoutés depuis plus de quarante ans les avertissements des écologistes, conscients des limites de la planète et des dangers de la bombe “P”.
C’est dans la continuité de cette remise en cause du consensus populationniste, qui ne peut qu’aggraver la crise globale dans ses multiples aspects, que les Écologistes du MEI préconisent, comme l’association Démographie Responsable, une refonte radicale des allocations familiales. »
Le MEI propose que les allocations familiales soient attribuées dès le premier enfant et s’élèvent à 100€ par mois, puis à 150€ pour une famille de deux enfants ou plus. Au-delà de deux enfants, les allocations n’augmenteraient pas et cela quel que soit le nombre d’enfants. Pour le MEI, cette réforme devrait être sans effet rétroactifs et ne s’appliquer qu’aux familles ayant à la date de sa promulgation deux enfants au plus et aux nouvelles naissances. Pour remplir les exigences de justice sociale, le MEI propose qu’« une telle refonte du principe des allocations devra être accompagnée d’une modulation suivant le revenu et d’une réforme de la fiscalité ».
Ces propositions devraient être reformulées pour couvrir le cas des familles «recomposées». Il faudrait mieux définir le nombre d’enfants par femme que par famille. Sans doute insuffisantes et en retrait par rapport aux mesures proposées par René Dumont en 1974, elles sont cependant à des années lumières en pointe par rapport au brouet que propose EELV. Ce serait un bon compromis pour commencer à inverser la tendance nataliste qui imprègne toutes les couches de la société française.
Mais voilà, dans sa lutte contre les Verts pour représenter l’écologie sur la scène politique nationale, le MEI a perdu et se trouve réduit à l’état d’un groupuscule qui a du mal à survivre, qui n’est plus représenté que dans quelques municipalités ou régions, qui réalise des scores insignifiants lors des élections lorsqu’il arrive à trouver des candidats. Sur cette question des allocations familiales comme sur beaucoup d’autres, c’est le MEI qui est le porte-parole de l’écologie politique et non EELV mais personne, ou presque n’écoute le MEI qui n’a d’ailleurs guère de tribunes pour se faire entendre!

Vendredi 7 Février 2014 Commentaires (1)

Commentaires

1.Posté par Didier Barthès le 08/04/2014 17:02
Bonjour,

Il est extrêmement curieux que l'écologie puisse aujourd'hui majoritairement faire l'impasse sur la démographie.
Comment ne pas comprendre que quels que soient nos efforts en matière de comportements, ils seront réduits à néant si nous sommes trop nombreux ? La simple occupation des espaces dévolus aux autres espèces nous conduira inéluctablement à l'écroulement des équilibres écologiques.
Même si certains souhaitent re-densifier les villes et entasser les hommes (malgré les dégâts constatés de cette politique), il n'y a pas d'autre solution que d'être moins nombreux (par réduction de la fécondité bien entendu) si nous voulons préserver des espaces sauvages.
D'accord sur ce point avec l'écologiste Michel Tarrier, je suis persuadé qu'il n'y a pas de pacte écologique sans pacte antinataliste. La baisse de notre fécondité est une condition sine qua non des équilibres futurs.
Nous avons multipliés par 35 nos effectifs depuis Jésus Christ et par deux simplement depuis que l'homme a posé le pied sur la Lune, c'était hier ! Peut-on sérieusement continuer dans la même voie ?

Comment faire cesser le tabou ? Comment montrer que l'humanisme est du côté de cette humilité que constituerait une démographie plus modeste ? Peu de mouvement en France s'en préoccupent ou adhèrent à cette idée. Dans les mouvements politiques, seul le MEI a en effet une sensibilité en ce sens, et dans les association seule l'association Démographie Responsable agit dans cette optique.

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