Fontenay-aux-Roses
Il est difficilement acceptable qu’une protection réglementaire dont bénéficient un espace vert et les arbres qui y résident puisse être annulée très facilement, ce qui rend cette protection excessivement fragile et dépendante des changements de majorité, des alliances, des marchandages dans les conseils municipaux ou autres assemblées territoriales. Le classement en EBC par exemple est certes nécessaire mais ne saurait être suffisant.
A Fontenay-aux-Roses, le cas de la Place de Gaulle avec ses marronniers, les uns abattus et les autres en passe de l’être en fournit, hélas, une preuve éclatante. Il aura suffi que dans le nouveau PLU, Messieurs Vastel (maire) et Faye (adjoint à l’urbanisme) déclassent cet espace pour que ces arbres soient détruits sans autre forme de procès et sans recours possible devant les tribunaux pour que soient plaidées leur cause et la cause de cette place, véritable cœur de la ville, de son individualité singulière.
Il en va des marronniers de la place de Gaulle comme d’autres êtres naturels irrémédiablement détruits et de la Nature elle-même qui n’a jamais été aussi malmenée malgré un arsenal juridique impressionnant censé les protéger.
La faiblesse et l’inefficacité de ces protections viennent du fait que ces êtres ne sont protégés juridiquement qu'en tant qu’OBJETS et non en tant que SUJETS pouvant se défendre devant les tribunaux, par l’intermédiaire d’un porte-parole, bien entendu.
Que cela puisse être le cas, et que cela soit efficace, c’est qu’argumentait Christopher Stone, un professeur de droit californien en 1972 dans un article intitulé « Les arbres doivent-ils pouvoir plaider ? » (récemment traduit en français avec une préface de Catherine Larrère aux éditions Le Passager Clandestin).
En la circonstance, les arbres en cause étaient des Séquoias de la Mineral Valley, une vallée alpine sauvage et reculée dans laquelle la société Walt Disney voulait construire une gigantesque station de ski. (Hé, oui ! vous avez bien lu : la société Walt Disney, Mickey ou plutôt Picsou…)
L’affaire est remontée jusqu’à la Cour Suprême fédérale devant laquelle les défenseurs de la vallée (le Sierra Club) ont perdu au motif que n’étant pas personnellement lésés, ils n’avaient pas intérêt à agir (3 voix contre 4). L’un des juges William Douglas qui a voté en faveur du Sierra Club a repris dans son argumentaire la proposition de Stone de conférer une personnalité juridique aux êtres naturels et qu’ils puissent être représentés devant les tribunaux comme c’est le cas (aux USA) pour certains êtres inanimés.
S’agissant de leurs porte-paroles, le juge Douglas considérait que ce devaient être ceux qui ont une relation intime avec la chose inanimée qui va être blessée, polluée ou dégradée. Mutatis mutandis, dans le cas de la place de Gaulle et les marronniers, ce seraient les Fontenaisiens qui aiment ce mail et ses marronniers constitués ou non en association qui seraient ces porte-paroles.
Après avoir été très mal accueillie, la proposition du professeur Stone, reprise par le juge Douglas a fait son chemin mais dans d’autres pays que la France, par exemple en Nouvelle Zélande qui a accordé le statut de personne juridique à un fleuve situé sur le territoire d’une communauté Maori qui en est son représentant légal. En France malheureusement accorder des droits à de telles entités se heurte à la division fondamentale du droit qui sépare celui des personnes d’avec celui des choses, tandis que les humanistes exclusifs qui règnent dans les comités divers et variés considèrent cette attribution comme contraire à la tradition qu’ils défendent et à la dignité humaine telle qu’ils la conçoivent.
Bref, ce n’est pas demain que les marronniers et la Place de l’église seront dotés d’une personnalité juridique et pourvus d’un représentant légal. Ils seraient ainsi soustraits aux bons ou mauvais vouloirs des politiques, aux aléas des changements de majorité dans les assemblées qui ont le pouvoir de définir les documents d’urbanisme et l’affectation des sols ; ils pourraient faire valoir leur point de vue et faire respecter leurs droits.
Et d’ailleurs, demain, il est fort possible qu’ils aient disparu. Il y aura sans doute toujours une place dénommée Place de Gaulle, mais ce ne sera en fait qu’un homonyme. C’est une autre qui sera là, à la même place.
Si l’on envisage la question sous un angle plus global dans ce pays, il est fort probable que les rivières, des forêts, les landes, les zones humides, les prairies d’altitude, leurs habitants permanents, la faune et la flore seront encore et toujours malmenés puisque peu de gens, y compris parmi les écologistes, sont prêts à reconnaître leurs droits. La plupart sont plutôt enclins à vous rire au nez lorsque vous abordez la question.
Note : L’histoire s’est bien terminée pour la Mineral Valley. La société Walt Disney a abandonné le projet. Je ne suis pas certain qu’il en ira de même pour ce qui reste de la Place de Gaulle…
Il en va des marronniers de la place de Gaulle comme d’autres êtres naturels irrémédiablement détruits et de la Nature elle-même qui n’a jamais été aussi malmenée malgré un arsenal juridique impressionnant censé les protéger.
La faiblesse et l’inefficacité de ces protections viennent du fait que ces êtres ne sont protégés juridiquement qu'en tant qu’OBJETS et non en tant que SUJETS pouvant se défendre devant les tribunaux, par l’intermédiaire d’un porte-parole, bien entendu.
Que cela puisse être le cas, et que cela soit efficace, c’est qu’argumentait Christopher Stone, un professeur de droit californien en 1972 dans un article intitulé « Les arbres doivent-ils pouvoir plaider ? » (récemment traduit en français avec une préface de Catherine Larrère aux éditions Le Passager Clandestin).
En la circonstance, les arbres en cause étaient des Séquoias de la Mineral Valley, une vallée alpine sauvage et reculée dans laquelle la société Walt Disney voulait construire une gigantesque station de ski. (Hé, oui ! vous avez bien lu : la société Walt Disney, Mickey ou plutôt Picsou…)
L’affaire est remontée jusqu’à la Cour Suprême fédérale devant laquelle les défenseurs de la vallée (le Sierra Club) ont perdu au motif que n’étant pas personnellement lésés, ils n’avaient pas intérêt à agir (3 voix contre 4). L’un des juges William Douglas qui a voté en faveur du Sierra Club a repris dans son argumentaire la proposition de Stone de conférer une personnalité juridique aux êtres naturels et qu’ils puissent être représentés devant les tribunaux comme c’est le cas (aux USA) pour certains êtres inanimés.
S’agissant de leurs porte-paroles, le juge Douglas considérait que ce devaient être ceux qui ont une relation intime avec la chose inanimée qui va être blessée, polluée ou dégradée. Mutatis mutandis, dans le cas de la place de Gaulle et les marronniers, ce seraient les Fontenaisiens qui aiment ce mail et ses marronniers constitués ou non en association qui seraient ces porte-paroles.
Après avoir été très mal accueillie, la proposition du professeur Stone, reprise par le juge Douglas a fait son chemin mais dans d’autres pays que la France, par exemple en Nouvelle Zélande qui a accordé le statut de personne juridique à un fleuve situé sur le territoire d’une communauté Maori qui en est son représentant légal. En France malheureusement accorder des droits à de telles entités se heurte à la division fondamentale du droit qui sépare celui des personnes d’avec celui des choses, tandis que les humanistes exclusifs qui règnent dans les comités divers et variés considèrent cette attribution comme contraire à la tradition qu’ils défendent et à la dignité humaine telle qu’ils la conçoivent.
Bref, ce n’est pas demain que les marronniers et la Place de l’église seront dotés d’une personnalité juridique et pourvus d’un représentant légal. Ils seraient ainsi soustraits aux bons ou mauvais vouloirs des politiques, aux aléas des changements de majorité dans les assemblées qui ont le pouvoir de définir les documents d’urbanisme et l’affectation des sols ; ils pourraient faire valoir leur point de vue et faire respecter leurs droits.
Et d’ailleurs, demain, il est fort possible qu’ils aient disparu. Il y aura sans doute toujours une place dénommée Place de Gaulle, mais ce ne sera en fait qu’un homonyme. C’est une autre qui sera là, à la même place.
Si l’on envisage la question sous un angle plus global dans ce pays, il est fort probable que les rivières, des forêts, les landes, les zones humides, les prairies d’altitude, leurs habitants permanents, la faune et la flore seront encore et toujours malmenés puisque peu de gens, y compris parmi les écologistes, sont prêts à reconnaître leurs droits. La plupart sont plutôt enclins à vous rire au nez lorsque vous abordez la question.
Note : L’histoire s’est bien terminée pour la Mineral Valley. La société Walt Disney a abandonné le projet. Je ne suis pas certain qu’il en ira de même pour ce qui reste de la Place de Gaulle…
Mardi 22 Janvier 2019
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